Extrait du livre :
"La théorie du succès"
Nos croyances
Nous incarnons en grande partie ce que nous croyons représenter.
En 1968, une institutrice américaine, Jane Elliott, osait mettre en place une expérience incroyable sur ses élèves. Cette expérience consistait à leur faire croire que certains étaient meilleurs que d’autres sur base de la couleur de leurs yeux. Le but était de leur faire vivre la brutalité du racisme et les éduquer à la tolérance et au respect de l’autre.
Dans un premier temps, elle leur annonce que les élèves qui ont des yeux bleus sont meilleurs que les élèves qui ont des yeux marron. Elle leur explique en même temps, à la suite de cette supériorité des uns aux autres, qu’ils ne doivent pas jouer ensemble et ceux qui sont inférieurs doivent être distingués par une marque, un collier. Les élèves finissent par adopter cette croyance, car l’enseignante leur donnait beaucoup de références au fur et à mesure pour les persuader. S’il y a un élève qui met du temps à se ranger par exemple, l’institutrice leur explique que c’est parce qu’il a des yeux marron ; et que les autres ne se comportent pas de la même manière, car ils sont supérieurs grâce à la couleur de leurs yeux.
Ils éprouvaient, en effet, des sentiments de supériorité ou d’infériorité, suivant leur propre croyance d’eux-mêmes. Ceux qui se voyaient comme supérieurs méprisaient, soi-disant, les élèves inférieurs. Ces derniers encaissaient les mauvais traitements sans aucune résistance notable. Un autre jour, l’institutrice inverse les rôles : les élèves aux yeux marron, qui étaient inférieurs, deviennent supérieurs aux autres élèves. Ce changement crée une situation d’incompréhension et de confusion au départ, mais tout le monde finit par adhérer de nouveau à cette nouvelle croyance. Les élèves aux yeux marron, qui vivaient la discrimination, devenaient plus compatissants vis-à-vis de leurs camarades dans cette deuxième phase de l’expérience.
Tout comme une perception, une croyance, à mon avis, ne doit pas être évaluée par le vrai et le faux. Une croyance reste une croyance, car ce n’est pas justement une vérité absolue. Elle n’a de certitude que pour celui qui l’adopte. L’intérêt des croyances réside principalement dans leur pouvoir sur nos actions. Leur évaluation doit être mesurée sur base de leur influence sur nos actions. Si une croyance nous pousse à réaliser nos buts, alors il faut la renforcer, sinon on la détruit. Une croyance n’a de valeur que dans la mesure où elle permet d’influencer nos actions positivement.
Commençons par analyser la source des croyances. En général, l’environnement influe sur notre façon de voir les choses. C’est pour cela que d’un pays à l’autre on se comporte différemment, on pense différemment, et on croit différemment. On est, d’une certaine façon, conditionné à se comporter dans un cadre bien tracé, bien défini. Les médias exercent un grand effet sur nos perceptions, ils nous dictent le cadre de ce qui est faisable, ou même pensable. Ce cadre, où on peut exercer notre pensée librement, est plus grand dans les pays démocratiques.
La plupart de nos croyances nous viennent aussi de notre entourage. On peut y trouver celles qui sont ancrées dans notre conscience depuis l’enfance. Un enfant est le plus perméable à recevoir des croyances. Un enfant a un grand besoin de former ses croyances, car il doit comprendre tout ce qui l’entoure. Et puisque l’adulte ne trouve pas forcément des réponses à toutes les questions que l’enfant se pose, ce dernier, pour satisfaire son besoin, associe des croyances à ce que représente chaque chose dans l’environnement qui l’entoure, certaines disparaissent avec la maturité et d’autres restent intactes à jamais.
Pourquoi garde-t-on des croyances dont la formation remonte à notre enfance ? Pourquoi ne peut-on mettre en question nos croyances qui nous ont accompagnés depuis qu’on a commencé à avoir conscience de notre existence ? D’où vient cette invincible résistance au changement ?
C’est difficile de se débarrasser des croyances, car notre conscience les valide au fur et à mesure qu’on trouve ce qui les explique. C’est ce qu’on appelle les références. Un professeur, par exemple, peut faire croire à son élève, involontairement, qu’il est nul en mathématiques en lui montrant ses faibles résultats, et en le lui faisant comprendre à nouveau dès qu’une telle occasion se présente. L’élève finira donc par le croire, d’autant plus que ses résultats lui confirment cette croyance (référence). C’est ce qu’on appelle en psychologie l’impuissance apprise (ou acquise). C’est en quelque sorte, la même chose que si on apprenait à l’élève d’être certain qu’il est nul ; et le professeur y arrive avec brio, mais tout en visant l’inverse bien sûr.
Toutes nos croyances se basent sur des références, si on analyse ces références, on peut les mettre en question.
Comprendre ses croyances revient à comprendre son conditionnement. Si on arrive à voir en toute neutralité la manière dont on est conditionné, on maximisera notre liberté de penser, et notre capacité d’agir en faveur de notre développement personnel. Souvent, on ne fait que consommer les pensées des autres, sans jamais en produire, ce qui revient à déléguer la construction du soi à autrui. Cela est un autre sujet que je développerai dans un chapitre plus loin.
Revenons à présent au sujet de la formation des croyances. Des expériences dans ce cadre montrent que les élèves d’une même classe peuvent aboutir à de meilleurs résultats si simplement on leur fait croire qu’ils sont doués ; en même temps, ces mêmes élèves peuvent obtenir des résultats faibles, si on leur répète qu’ils sont faibles.
Le seul fait que nous croyons à quelque chose nous fait agir dans le sens de lui donner plus de certitude. C’est pour cela qu’il importe peu de savoir si une croyance est vraie ou fausse. Mais il faut plutôt se demander vers où elle peut nous pousser à agir. Si elle nous pousse vers la réalisation de nos buts, alors il faut l’adopter et la renforcer en cherchant le maximum de références possible ; dans le cas inverse, il faut s’en débarrasser en mettant en question toutes les références sur lesquelles elle se base.
De nombreux scientifiques dans l’histoire ont été jugés par le système scolaire comme faibles, voire nuls et bons à rien, ils n’ont pas pour autant cru à cela ; bien au contraire, ils ont contribué à changer, à force de croire fort aux idées qu’ils portaient, le cours de l’histoire, notamment en sciences. Je peux citer parmi eux : Thomas Edison, Albert Einstein et Stephen Hawking.
L’habitude fait qu’on ne peut croire à une chose sans preuve suffisante, ce qui constitue une limitation à notre cerveau à générer aisément de nouvelles croyances. Quelqu’un qui ne croit pas qu’il peut arrêter de fumer n’engagera aucune démarche dans ce sens ; pareil pour quelqu’un qui veut perdre du poids, mais qu’il croit en être incapable ; la même chose pour une personne qui croit qu’elle ne peut jamais trouver un travail ; etc. Il faut croire d’abord à ce qui sert notre objectif, puis renforcer cette croyance par toute référence possible, pour en augmenter la certitude en notre for intérieur.
Si une croyance peut transformer quelque chose en nous, faire émerger une compétence, nous faire agir dans le cadre de nos objectifs, alors la question suivante se pose : pourquoi ne pas croire à une idée dont on ne peut établir la moindre certitude au départ ?
Il est tout à fait possible d’adopter de nouvelles croyances. Notre cerveau ne peut croire à quelque chose si on n’arrive pas à justifier la croyance en question. C’est pour cette raison que la pratique de la réflexion présente une source incroyable pour développer des références et donc des croyances. Bien sûr au départ, quand on veut adopter une nouvelle croyance, notre cerveau résiste à la prendre au sérieux. Mais, on peut très bien résister dans ce dialogue interne qui se déroule dans notre cerveau. On peut consciemment forcer l’émergence des nouvelles croyances en créant des références, et résister jusqu’à ce que le cerveau les adopte et les prenne au sérieux. Ce n’est qu’à ce moment que notre comportement s’adapte aussi pour se manifester en adéquation avec les nouvelles croyances créées. J’aime bien dans ce sens l’histoire de John Assaraf, l’un des experts en psychologie et fonctionnement du cerveau. Il raconte dans l’une de ses interviews, sa propre histoire que je trouve fascinante, la voici en bref :
Quand il avait 19 ans, son coach lui a demandé de répondre à plusieurs questions sur ce qu’il veut réaliser comme objectifs, sur le plan spirituel, professionnel, relationnel, etc. Il lui demandait chaque fois de rehausser ses objectifs, et de ne pas se préoccuper dans un premier temps de leur faisabilité. Parmi ses objectifs, il avait noté qu’il devait devenir un millionnaire à 45 ans. Il lui a demandé ensuite d’écrire des croyances qui peuvent être adoptées pour réaliser chaque objectif, puis les actions pratiques qu’il doit accomplir quotidiennement. Son coach lui demandait de lire chaque jour ce qu’il a écrit. Pendant un ou deux mois, son cerveau lui répétait : « ce n’est pas vrai, impossible, il faut oublier… ». Mais à la longue, avec la persévérance, la progression et la certitude acquise à la suite des actions quotidiennes (construction des références), ses croyances s’installent et se renforcent. Ses croyances l’ont poussé à réaliser tous ses objectifs et vivre sa vie telle qu’il l’entendait.
Les références, qui nous donnent plus de certitude par rapport à nos croyances, on peut les constituer au fur et à mesure. De ce fait, la finalité de la croyance compte plus que sa véracité. Le cerveau humain est programmé pour résister à tout changement, car dans chaque changement il y a l’inconnu, donc une situation de risque et d’inconfort (une douleur). C’est pour cela qu’il faut au départ forcer le changement pour qu’il devienne une habitude, et notre cerveau s’y adaptera.
Je veux bien vous raconter une histoire qui illustre bien le pouvoir des croyances sur nous, sur notre avenir, sur ce que nous devenons concrètement. Cette histoire est celle de Thomas Edison. D’après ses professeurs, il éprouvait des difficultés à suivre ses cours à l’école, il était très faible. On le renvoya très tôt du système scolaire, car on jugeait qu’il était inutile de le garder en classe.
On rapporte par plusieurs sources qu’il est rentré une fois de l’école, une lettre à la main, qu’il devait précieusement donner à sa mère, pour lui communiquer un message important. Sa mère en ouvrant la lettre, elle était tout de suite émue en découvrant ce qu’on a écrit sur son fils. Elle commença alors à lui lire à haute voix qu’il était quelqu’un de doué et que l’école n’avait pas les moyens pour assurer son enseignement. Sa mère lui a caché qu’elle avait lu l’inverse de ce qui était écrit dans la lettre. Bien au contraire, son professeur le trouvait plutôt très faible, voire mentalement anormal, et que l’école ne peut pas se charger de son apprentissage.
Thomas Edison, croyait sa mère quand elle lui disait qu’il était doué, il est devenu effectivement ce qu’il croyait être. Le fait que sa mère lui disait qu’il était doué avec beaucoup d’émotions a certainement un impact fort sur le fait que l’enfant accorde une grande certitude à sa croyance qu’il était un vrai génie. Il croyait qu’il était doué, alors son comportement agit en adéquation avec sa croyance durant toute sa vie. À 10 ans, il possédait déjà un petit laboratoire de chimie.
Plus tard, il est devenu l’un des plus grands inventeurs de son siècle, et c’est toujours grâce à l’ampoule qu’il a inventée que nous éclairons nos maisons aujourd’hui. Il était connu par sa persévérance, il ne percevait pas les échecs comme tels, mais plutôt des solutions qui ne marchent pas, grâce auxquelles des solutions finales peuvent être perfectionnées. L’impossible n’existait pas dans son vocabulaire courant.
D’une manière générale, si on compte les réalisations jugées comme impossibles avant leur concrétisation, on finira par croire, presque avec une certitude cartésienne, que l’impossible n’existe pas. Au-delà du monde connu, il n’y a qu’un monde inconnu. Dire que la réalisation de quelque chose est impossible, suppose une connaissance parfaite de toutes les possibilités de sa réalisation ; or, les ressources pour réaliser quelque chose sont illimitées, car le champ de la pensée est sans borne, ce qui lui échappe relève plutôt du monde inconnu.
L’histoire de Thomas Edison illustre bien ce qu’on appelle l’effet Pygmalion. À travers une simple expérience, le psychologue Robert Rosenthal démontre que le seul fait qu’on croit à quelque chose, on contribue à le réaliser. Dans cette expérience, on a mis deux groupes de rats en situation d’apprentissage dans un labyrinthe. On a fait croire à un groupe d’étudiants que les rats qu’ils vont recevoir étaient précieusement sélectionnés sur base de leur grand niveau d’intelligence ; et à un autre groupe d’étudiants que les leurs étaient les plus débiles. Bien sûr, en réalité, c’étaient des rats pris au hasard, ils étaient complètement pareils. Le résultat de cette expérience confirme que les étudiants, qui ont cru avoir reçu des rats intelligents, se sont comportés en accord avec leurs croyances au point que leurs rats ont effectivement réalisé une meilleure performance que les autres.
Tout le pouvoir des croyances réside dans la facilité d’en créer continuellement, une fois que l’on comprend le processus de leur formation. Il suffit de percevoir quelque chose autrement, et en construire une croyance qui produira des effets sur nos actions. Pour qu’une perception devienne une croyance forte et bien ancrée dans la conscience, il faut simplement associer cette croyance à des faits qui la valident ou semblent la valider. Il faut écrire ses faits, penser continuellement à leur déroulement, et répéter ce processus à intervalle régulier pour renforcer cette croyance au point de devenir une conviction.
Une conviction, voilà un autre mot dont l’essence véhicule encore plus de pouvoir sur notre comportement qu’une croyance, le chapitre suivant vous en dit davantage.